25 novembre 2018

Explosion de couleurs

Il existe un terme fascinant pour parler des emprunts fautifs à une langue pour une autre: les "faux amis". Un exemple clair que les francophones font souvent quand ils débutent en anglais: utilisez le I demand croyant qu'ils viennent de "demander" quelque chose. Erreur. En anglais, le verbe to demand signifie "exiger". Ça fait donc un peu bête d'exiger un hamburger au restaurant!

En japonais, il y a aussi des faux amis. Le plus courant est le mot « saké » qui existe en japonais, mais il désigne en fait tous les alcools. Ça inclut donc la bière, le vin et ce qu’on appelle le saké. C’est donc une erreur d’utiliser saké pour parler de l’alcool de riz. Au Japon, on l’appelle plutôt le nihonshu (soit « alcool du Japon »).

Les faux amis sont présents dans toutes les langues. Par exemple, les Japonais utilisent french kiss pour parler d’un petit bisou léger! Le french est appelé deep kiss en japonais! Oh oh! Ils ont associé le romantisme de la France au french kiss, un baiser au contraire extrêmement explicite (et pas particulièrement romantique, bien davantage érotique!) Je trouve ces problèmes de traduction fascinants parce qu’ils exposent bien qu’une erreur peut devenir une norme!

J’en reviens à nos aventures. Mardi, après le cours de japonais de Léo, nous sommes allés ensemble au Heian-Jingu, le temple construit pour fêter le 1100e anniversaire de la ville de Kyoto, en 1895. C’est un temple toujours très joli et, en fin de journée, il y avait peu de gens, une rareté en ce moment. J’en ai profité pour faire faire des maths à Léo: ça veut que Kyoto a quel âge maintenant?

Après, nous nous sommes dirigés vers la gare de Kyoto. Émi se faisait couper les cheveux au salon de coiffure pour enfants. Question pour vous: est-ce que des salons de coiffure pour enfants existent chez nous?

Jeudi, j’avais une journée spéciale avec l’école: c’était la sortie scolaire! Nous nous sommes rencontrés tôt le matin pour un départ en autobus vers le village ninja de Iga-Ueno. En arrivant, on a visité une maison plein de cachettes et on a eu droit à un spectacle à la fois intéressant, instructif et drôle de ce que furent véritablement les ninjas, aussi appelés shinobi.

Le village ninja est situé dans un grand parc où il est possible également de visiter le château Iga-Ueno. Avant d’y aller, j’ai fait le tour des douves et j’ai trouvé le Kyusukôdô, une école bâtie pendant l’ère Edo (vers 1821) sur le terrain d’une ancienne bibliothèque. Le pavillon principal de 72 tatamis où les élèves étaient instruits à la dure (ils avaient de très longues journées!) était très beau. Est-ce que la beauté peut atténuer la rigueur? Cela a pu avoir cet effet sur certains élèves, je crois.

J’ai ensuite rejoint mon groupe qui visitait le château. Le château est tout petit, mais il y avait une exposition d’armures et de calligraphie à l’intérieur. Avant que l’autobus ne quitte, je suis passée au mémorial dédié à Bashô Matsuo. Ceux et celles qui écrivent des haïkus connaissent bien cet écrivain, connus à la fois pour ses poèmes et ses voyages à pied à travers le Japon. Dans ses carnets de voyages, il a pratiqué le haïbun, un type d’écriture mélangeant les poèmes haïkus et les courts paragraphes en prose. J’aime beaucoup ce style.

Le trajet sur l’autoroute était très joli car l’autobus permet de bien voir des routes suspendues entre les montagnes. On a passé sur le pont Ômiô, un pont qui a tout juste dix ans. C’est un pont à poutres en porte-à-faux (cantilever en anglais) comme le pont de Québec, c’est-à-dire qu’il est construit pour que l’enchevêtrement permette au tablier du pont de tenir. Il est impressionnant.

Vendredi, avec Megumi, mon amie d'Okinawa en visite, nous avons loué une voiture pour aller visiter un vignoble dans les environs du lac Biwa, le brasseur Ohta (aussi fabriquant de sakés, de shôchû et de umeshu). J’avais préparé des questions en japonais, alors j’ai pu non seulement goûter à d’excellents sakés, mais aussi à leurs vins. Personnellement, j’ai adoré les cépages Red Millenium (blanc) et Yama-Sauvignon (rouge), des raisins uniques au Japon. Le premier est un raisin créé au Japon par Suntory avec un professeur d’université, mais on a perdu toutes les données sur cette création mystérieuse. Le deuxième est une variante du cabernet sauvignon qui pousse plus facilement dans les montagnes japonaises. Il donne une couleur violet intense au vin. On est aussi passé au village des tanukis (ratons-laveurs) à Shigaraki, c'était très drôle de voir les enfants au milieu de tous ces immenses ratons de céramique!

Samedi, ce fut une grosse journée! On a débuté par la visite du Kitano Tenman-gû qui est à distance de marche de notre maison. Il y avait plein d’enfants en superbes kimonos qui fêtaient leur shichi-go-san. Megumi et moi avons bientôt un gros examen et le Kitano est le lieu pour prier pour la réussite des examens car il est dédié au dieu Tenjin, inspiré de Sugawara no Michikaze, un lettré et poète réputé de l’ère Heian. On a donc prié en admirant la beauté du sanctuaire. Il y avait même un singe apprivoisé qui faisait des acrobaties.

On a pris un autobus jusqu’à la gare de Kyoto pour y manger ensemble, puis on est allés en train au Tôfuku-ji, le temple de « la chance de l’est », reconnu pour ses érables… Il y avait une immense foule qui allait tous au même endroit! Mais ça en valait la peine, comme vous pouvez le voir, c’était absolument extraordinaire! Les préposés criaient parfois qu’il était interdit de prendre des photos, mais les gens s’arrêtaient quand même pour le faire… Car c’était impossible de ne pas en prendre, c’était trop beau!

Les enfants sont retournés à la maison avec Philippe. Megumi et moi avons poursuivi vers le sud, jusqu’à Uji, la ville du thé vert. On a mangé des nouilles au matcha (bien sûr), puis on est allés admirer le Byôdô-in (le « temple du Phénix », un de mes préférés, il est sur les 10 yens). Il était éclairé de soir, la lune était presque pleine, les érables rouges… On ne peut rêver d’un meilleur moment! Fantastique!

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