24 juin 2013

Jardins Quatre-Vents, Charlevoix

Iris et pont japonaisIl est 9h, samedi matin, et nous courrons dans les champs pour rattraper le groupe. Les chevaux soulignent notre passage d’un soupir et nous nous arrêtons essoufflés devant le guide. Nous sommes sur la « Sunset Hill » de La Malbaie, un endroit que tout le monde aperçoit de la ville, mais inaccessible à peu près tous les jours de l’année.

Sauf aujourd’hui. Et trois autres samedis de l’été.

PigeonnierAujourd’hui, nous sommes sur le terrain privé de la maison d’été de M. Cabot. Pour visiter ses jardins, une merveille presque secrète…

Ne vous battez pas, tous les billets sont vendus longtemps d’avance. On réserve au début de l’année, sur le site du Centre écologique de Port-au-Saumon, un lieu cher à ma mémoire car j’y aie passé tous les étés de mon enfance. Mon grand-père avait construit un chalet en bois rond, qui appartient maintenant au Centre. Mon nom est toujours gravé sur le mat du drapeau, c’était le seul mot que je savais écrire…

Boeufs HighlanderTrois générations de Cabot ont travaillé sur cette montagne pour créer les jardins de Quatre-Vents tels qu’ils sont aujourd’hui. Jardin d’épices, jardin blanc, jardin de roses, porte qui mène le regard vers le menhir dans les champs, bœufs highlander qui viennent observer les curieux, pont de lune, iris avec un arrière-plan shintoïste, potager… La visite dure deux heures et demi, et ce n’est pas pour rien.

Tout près des champs, un petit pavillon de musique attend les artistes. Quand la guide a demandé si quelqu’un voulait y chanter quelque chose, Philippe et moi avons interprété « Sakura sakura ». La petite salle de merisier servait d’amplificateur naturel. Magnifique petit moment pour nous!

Jardin japonaisLe dernier ajout aux jardins est celui que je souhaitais le plus admirer : le jardin japonais et ses deux pavillons. Le mélange de la végétation québécoise à cette architecture japonaise était fantastique : particulièrement la lumière sur le bouleau qui venait chercher parfaitement le blanc des pavillons. Enchanteur.

Tous les profits de ces visites sont des dons pour le Centre écologique. Alors profitez-en pour mettre cela à votre liste des choses à faire dans Charlevoix…

Bonne Saint-Jean à tous! Je nous souhaite de ne pas oublier (des fois, je ne suis pas sûre qu’on a la bonne devise…)! ;)

04 juin 2013

Le féminin n’inclut pas le masculin

Les couleurs

Bébé a trois mois. Déjà, vous n’en pouvez plus du bleu, du noir et du vert. Vous visitez un magasin de vêtements et demandez à la dame si les modèles de pyjama pour fillettes ont la même coupe. Elle vous confirme que c’est effectivement la même chose, sauf pour les couleurs. Heureuse, vous choisissez un pyjama mauve et rose, orné d’un gros chat. La vendeuse vous regarde étrangement: « Mais… Ça ne dérangera pas le papa de voir son garçon habillé comme ça? »

C’est malheureusement une histoire vraie. Je suis restée bouche bée et j’ai fini par répondre que non, papa ne s’en formaliserait pas, car il porte aussi des chemises roses. Tout comme ses deux grands-pères…

Dès la naissance, il faut marquer le genre de notre bébé. La chambre est souvent bleue ou rose. Les couvertures, les vêtements, les toutous, tout nous rappelle qu’un garçon, ce n’est pas la même chose qu’une fille.

Or si on permet maintenant aux fillettes de porter du bleu, du vert ou du noir (sans camion dessus toutefois! :P), je vous mets au défi de chercher un chandail, un polo ou une chemise rose ou mauve. Il faut être déterminé. Très déterminé.

Les jouets

Bébé a deux ans. Il s’amuse avec des camions, des casse-têtes et des blocs. Un jour, en arrivant à la garderie, vous remarquez que votre petit garçon adore par-dessus tout la mini-poussette qu’il promène joyeusement en parlant au bébé dedans. Oseriez-vous lui en acheter une pour son anniversaire?

Il y a toujours une hésitation quand on s’aventure avec un bébé masculin dans la section « fillettes » des magasins: celle décorées de cœurs roses, de princesses et d’instruments de cuisine. On se fait regarder étrangement quand on demande à son petit garçon: Quelle poussette te ferait plaisir? Tu veux cette poupée ou celle-là? Quel nom vas-tu lui donner?

Pourtant, s’aventurer dans la section « garçon » avec une fillette n’est plus aussi difficile. Une fille qui s’intéresse aux jouets des garçons, ça se peut. Je ne dis pas qu’on l’encourage à cent pour cent, mais ce n’est pas mal vu. Au lieu de se dire qu’elle deviendra « masculine », on se dit plutôt qu’elle sera une fille forte, comme la princesse Mérida, héroïne de Rebelle de Disney.

Oups! C’est vrai que la renommée compagnie n’a pas hésité à charcuter ce personnage pour le rendre davantage « princesse », C’en est fini de la taille normale de Mérida, de ses cheveux naturels un peu ébouriffés, de son allure guerrière: elle devient maintenant anormalement mince, aux cheveux volumineux, bien habillée… Une pétition réclamant le retour de la vraie Mérida a même été lancée en ligne!

Les livres

Bébé a cinq ans. Il adore les livres, surtout les histoires avec les loups. Il a alors ce délicieux petit frisson de peur, juste suffisant pour créer une tension, un stress, une émotion. Vous croisez un superbe livre qui s’appelle La petite fille et les loups à la librairie. Oserez-vous l’acheter même s’il met en scène un personnage féminin? Et si votre garçon ne s’identifiait pas au personnage?

Les fillettes pourront pourtant lire Flûte de flûte, Victor! et les plus âgées pourront aborder la Cartographie pour jeunes apprentis. Les filles peuvent lire tous les livres, peu importe que ce soit pour un public féminin ou masculin.

Mais le pauvre garçon devra se contenter de ce qu’on a créé pour lui et qui exclut bien évidemment les fées, les cœurs et les héroïnes. Même les chevaux sont pour les filles, selon ce texte d’une libraire jeunesse!

La libération des femmes

La fillette peut porter du rose ou du bleu.
Elle peut aussi jouer avec des camions ou des superhéros.
Elle peut surtout lire ce qu’elle veut, même si le personnage est un garçon. Le masculin n’inclut-il pas le féminin en français?

Grâce au féminisme, on a permis à la femme d’être l’égale de l’homme. De choisir sa vie, sa carrière, le nombre d’enfants. Dans une large part, nous avons donc permis aux femmes de faire aussi ce qui était auparavant réservés aux hommes. C’est une remarquable avancée pour l’égalité. Et il faut continuer de solidifier ces droits.

Mais nous n’avons parcouru que la moitié du chemin.

Le garçonnet ne peut porter du rose ou du mauve.
Il ne peut jouer avec une poussette, bercer une poupée.
Il ne peut pas à s’identifier à un personnage féminin, ce qui lui exclut quantité de livres…

Avons-nous oublié de permettre aux hommes de faire ce que les femmes font? Ou est-ce trop difficile de permettre au « sexe fort » de copier le « sexe faible »?

Or en ne permettant pas au petit garçon d’expérimenter les jouets, les couleurs, les héroïnes, on lui dit déjà à quel point son statut de mâle est précieux, doit être préservé de toute attitude féminine, ce qui l’associerait à un homosexuel… On lui montre déjà ce qu’est la virilité, qui exclut le « prendre soin » d’une poupée, la tendresse, l’émotion.

Après tout, on le sait, les grands garçons ne pleurent pas.
Mais ils se suicident beaucoup, malheureusement.